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Le blog de Jacques de Cauna Chaire d'Haïti à Bordeaux

Un Pape américain créole… haïtien et béarnais : notre cousin Léon XIV

20 Mai 2025, 10:16am

Publié par jdecauna

Le Pape Léon XIV lors de la messe d'inauguration de son pontificat, place Saint-Pierre au Vatican, le 18 mai 2025

Le Pape Léon XIV lors de la messe d'inauguration de son pontificat, place Saint-Pierre au Vatican, le 18 mai 2025

Un pape américain créole… haïtien et béarnais : notre cousin Léon 

La traditionnelle fumée blanche du Vatican tant attendue et suivie de l’Habemus Papam nous a apporté la nouvelle de l’élection d’un pape américain au vrai sens du terme puisqu’il est à la fois citoyen des Etats-Unis d’Amérique, puisque né à Chicago, et du Pérou où il a longtemps servi, tout en portant le nom bien français de Robert Francis Prévost qui nous renvoie à la profondeur de l’histoire de ce continent. Mieux que cela, et justifiant pleinement ainsi l’intérêt que lui porte la Chaire d’Haïti à Bordeaux, le nouveau pape, qui a choisi le nom liturgique de Léon XIV, est véritablement créole par l’ancrage de ses aïeux dans un mode transatlantique dont les Libres de couleur de la Nouvelle-Orléans et les émigrants béarnais et haïtiens sont les protagonistes les plus remarquables.

On ne peut s’empêcher en premier lieu, en entendant le patronyme familial manifestement français, de penser au célèbre abbé Prévost auteur de la non moins célèbre Histoire du chevalier des Grieux et de Manon Lescaut qui s’achève par la déportation et la mort de l’héroïne dans le « désert » de la Louisiane à une époque où la Nouvelle-Orléans n’existait pas encore (en 1716) comme le montre bien l’affiche de l’opéra du même nom. Le nom de Prévost est d’ailleurs bien présent, à plusieurs reprises, dans les dossiers de l’indemnité aux anciens colons de Saint-Domingue dont l’un est d’ailleurs porté comme résidant à la Nouvelle-Orléans.

Mais c’est plutôt par la ligne maternelle de sa mère, Mildred Agnès Martinez (1912-1990) dont la mère, Louise Baquié, née et décédée à La Nouvelle-Orléans (1868-1945) et issue d’une ancienne famille béarnaise que la créolité s’est installée dans cette famille. Une photo de famille conservée nous la montre sévèrement habillée de noir comme il état de mise dans ces familles, telles que nous avons pu le voir par exemple il y a quelques années dans la personne de Jeanne Dubourdieu de Morlanne, une de nos parentes née à la Nouvelle-Orléans et revenue se marier à Arthez-de- Béarn avec le traditionnel trousseau de broderies de mariage.

Les Bacquié étaient originaires de Monein, et c’est sans doute par leur alliance avec la famille noble de Ganosse, des seigneurs d’Artix en Béarn, que serait venu cet appel des Îles. On voit en effet dès 1752 dans les départs par Bayonne, Jean (de) Ganosse, de Monein, embarqué partant pour la Martinique à Bayonne en 1772 à peine âgé de 19 ans (il était né en 1733), comme le fera vingt ans plus tard au même âge Jean-Pierre Bacquié, parti, lui, par Bordeaux le 6 avril 17721.

Quant à son demi-frère de ce dernier, « Augustin Baquié, de Monein », né en 1734, c‘est beaucoup plus tard, quinze ans après, et surtout plus âgé (il a déjà 53 ans et il est fort probable que ce n’est pas son premier voyage) qu’il part de Bayonne, lui aussi, pour la Martinique, le 8 octobre 17872.

L’armorial de Béarn, nous apprend peut-être la cause de ce départ prématuré de Jean Ganosse lorsqu’il indique clairement en son tome II, page 347, que « Le sieur Jean-Pierre de Ganosse, seigneur d’Artix » (en aval de Pau, dans la vallée du Gave), sans doute désargenté, avait vendu le 7 janvier 1742 sa seigneurie à Noble Pierre de Lafargue, né à Monein, ce qui valut à ce dernier d’être à nouveau reçu une seconde fois, le 17, aux Etats de Béarn, en réalité de Navarre, à Pau, admission qui était le principe de la noblesse béarnaise. Jean-Pierre de Ganosse, qui était resté un notable local, jurat de Monein, avait été le parrain de baptême en 1752 de Jean-Pierre Baquié, fils de sa fille de son mariage avec Jeanne Maubourguet, Jeanne-Marguerite de Ganosse, qui avait épousé en 1750 Jean « Baptiste » Bacquié, aussi bourgeois de Monein, fils de Pierre, né à Ossun en Bigorre, et de Marie Betbeder, dite Lenfant, d’une ancienne famille de Monein. Compte tenu de ce qui précède, il et probable que la dot dût être maigre...

C’est leur fils, ce « Jean-Pierre Baquié [sic, de Monein en Béarn », dont le lieu de naissance nous assure qu’il s’agit bien d’un Bacquié de la même famille], et dont a vu qu’il partit en 1772 par Bordeaux âgé de 19 ans pour la Martinique, pour rejoindre son oncle François Baquié [sic] qui était officier, capitaine major, de la compagnie des gendarmes de Saint-Pierre où il décéda en 1789. On le retrouve plus tard établi et marié en 1775 avec Elisabeth-Rose Blanchard à Capesterre de Marie-Galante, île de la Guadeloupe, dont il eut un fils Jean Rose Joseph Baquié, né en 1786 à Saint-Pierre (ce qui nous indique qu’il serait revenu en Martinique), lequel passa en Jamaïque où il se maria à Kingston en 1810 et fut père de plusieurs enfants dont au moins un fils que l’on retrouve installé en Louisiane et une fille qui épousa son oncle Bacquié.

En effet, Jean-Pierre, qui vécut jusqu’en 1815, avait eu aussi, devenu veuf en 1800, une liaison à Marie-Galante avec Marie-Thérèse Rancurel, qui lui avait donné deux fils nés à Pointe-à-Pitre : Auguste en 1806, et Aristide en 1811, lequel épousa en Louisiane (à Mobile) sa nièce Catherine Elizabeth Mathilde Bacquié, petite-fille d’Elisabeth-Rose Blanchard.

C’est la famille de Rancurel, bourgeois notables de Marseille issus des seigneurs de Roquevaire, notaires, juges, commis aux fermes du Roi, que l’on retrouve dans l’ascendance de notre cousin Léon, alliée aux Richelme, Négrel, Maurin, de Flotte, seigneurs de Roquevaire, et aux vicomtes de Marseille, et vicomtes d’Arles pour aboutir en remontant par les seigneurs de Miremont, Navailles, Plantagenets d’Angleterre, comtes d’Artois, de Forcalquier, de Provence, de Dreux de Brie-Comte Robert, les ducs de Sabran, au couple formé par Profecta de Marignane, dame de Berre, et son époux Pons, seigneur de Fos vers 945-1025, qui, outre les précédents, sont à l’origine d’une grande quantité de familles de la noblesse française – et surtout Aquitaine pour ce qui nous intéresse – d’extraction chevaleresque par les Trencavel, le vicomte de Carcassonne Raymond et sa sœur Aimable : les comtes et comtesses de Bigorre et vicomtes de Marsan, alliés aux vicomtes de Béarn, puis aux comtes de Foix, les Grailly et les vicomtes de Castelbon, les Castelnau-Tursan, pour aboutir à leurs descendants dans les cadets des la maison vicomtale de Marsan, barons de Cauna et leurs branches cadettes d'Abère, de Cassaber et de Nargassie en Béarn, de Vignoles-Lahire, de Mugron et Poyaler, de Camiade et Ladevie en Chalosse, seule subsistante, ainsi que leurs nombreux parents et alliés de Poyloault, de Caupenne, de Bazillac, d'Abzac, de Ségur, de Batz, de Monluc, de Thémines-Lauzières, de Lévis-Ventadour, de Gontaut-Biron, de Montesquiou, de Saint-Pastou, de Poudenx, de Castelbajac, de Baylens-Poyanne, de Pardaillan, de Dax-Brutails, de Borda, de Lizarazu, de Biaudos de Castéja, de Saint-Martin, de Bédorède, de Castillon, de Noaillan, de Mesmes, Darbo, Destoupignan, de Saint-Orens, Ducamp d'Orgas…, et bien d'autres maisons aquitaines, béarnaises, gasconnes et basques encore.

1 Jacques de Cauna, La colonisation française aux Antilles : les Aquitains à Saint-Domingue (XVIIe XVIIIe siècles), Thèse pour obtenir le grade de docteur d’État, Université Paris IV La Sorbonne, Paris, 12 janv. 2000, Tome II, p. 195, 116.

2 J. de Cauna, La colonisation…, op.cit., Tome II, p. 136.

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