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Le blog de Jacques de Cauna Chaire d'Haïti à Bordeaux

Hommage à Jean Fouchard à l'Institut Français d'Haïti le 27 mai 1988. Cliquer sur le lien pour l'interview consacré à l'événement par la radio nationale d'Haïti.

20 Décembre 2020, 16:24pm

Publié par jdecauna

La Tribune présidentielle à l'Institut Français autour du Président de la République d'Haïti Leslie Manigat : de gauche à droite : Laurore Saint-Juste, Georges Corvington, Jacques de Cauna (membres du Comité Directeur de la Société Haïtienne d'Histoire), Alain Turnier (Président de la Société), le Président Manigat (membre de la Société), Jean Fouchard (Doyen de la Société), Henri Deschamps (éditeur), René Piquion (écrivain).

La Tribune présidentielle à l'Institut Français autour du Président de la République d'Haïti Leslie Manigat : de gauche à droite : Laurore Saint-Juste, Georges Corvington, Jacques de Cauna (membres du Comité Directeur de la Société Haïtienne d'Histoire), Alain Turnier (Président de la Société), le Président Manigat (membre de la Société), Jean Fouchard (Doyen de la Société), Henri Deschamps (éditeur), René Piquion (écrivain).

Quelques souvenirs réveillés par une vieille photo… C’était il y a bien longtemps, dans une autre vie, le 29 mai 1988, il y a exactement 22 ans à l’Institut Français d’Haïti, alors situé au Bicentenaire, dans le bas de la ville de Port-au-Prince que n’avait pas encore frappée le séisme…

Le président de la République nouvellement élu le 7 février, après deux ans de transition post-duvaliériste contrôlée par l’armée, Leslie Manigat, au terme d’un remarquable discours (lire l’article du Progressiste annexé en images), remettait en grande cérémonie au Doyen de la Société Haïtienne d’Histoire et de Géographie, l’historien Jean Fouchard, entouré de ses confrères membres du bureau de la Société, les insignes de Grand-Croix plaque d’argent de l’Ordre National Honneur et Mérite de la République d’Haïti.

Administrateur et conseiller au bureau de la Société et premier blanc français à être élevé à cette redoutable responsabilité, j’eus l’honneur, très jeune encore, d’être mêlé à ces événements et de figurer à ce titre sur cette photo historique (malgré quelque approximation sur mon nom !), le troisième à partir de la gauche, entre le Secrétaire Georges Corvington et le regretté Président Alain Turnier. On reconnaît aussi, à l’extrême gauche, Laurore Saint-Just, malheureusement décédé également, au Québec, au centre le Président Manigat, à sa gauche, l’immortel auteur des Marrons de la Liberté, Jean Fouchard, puis l’imprimeur Henri Deschamps fils et René Piquion, membre de la Société.

Le professeur Manigat, universitaire internationalement reconnu et estimé, lui-même membre actif de la très ancienne Société, fondée au XIXe siècle dans l’esprit qui avait présidé dans les dernières années de l’Ancien Régime à la création du Cercle des Philadelphe du Cap, première société savante des Amériques, devait être renversé moins d’un mois plus tard, le 20 juin, par le coup d’état militaire du général Henri Namphy, premier d’une longue série, au moment même où je m’envolais pour Paris afin de plaider la cause du nouveau gouvernement, formé de nombreux membres de notre Société mais peu soutenu par notre ambassade, auprès du ministre de la Coopération français, Jacques Pelletier auprès de qui des amis de tous ordres (historiens, politiques, et même sucriers) m’avaient recommandé personnellement. Avec la chute de Leslie Manigat, dont  je ne pus que rendre compte dans les bureaux ministériels, disparaissait une chance d’évolution du pays vers un régime civil démocratique mené par un homme éclairé pour faire place aux régimes militaires autocratiques qui précédèrent la nouvelle dictature civile meurtrière du prêtre-président Aristide, seulement  interrompus par l’intermède démocratique de près d’un an (18 mars 1990-17 février 1991) assuré avec l’aide des généraux Abraham et Hilaire et l’appui des instances internationales par la courageuse présidente intérimaire Madame Ertha Pascal Trouillot, première femme présidente du pays au moment où les hommes qui la précédaient dans l’ordre protocolaire d’intérim de la Cour de Cassation s’esquivaient à tour de rôle avec des alibis divers. J’eus le plaisir de retrouver le président Manigat peu de temps après, dans son exil en France, lors d’une manifestation officielle dans le superbe amphithéâtre de la Sorbonne où nous tombâmes dans les bras l’un de l’autre pour le traditionnel abrazo latino-américain, au grand étonnement de l’assistance, alors qu’il occupait une place réservée aux invités d’honneur au premier rang.

Un peu plus de deux ans plus tard, en juillet 1990, je quittai le pays pour un nouveau poste diplomatique qui, après quelques péripéties, me ramena tout près d’Haïti, comme Conseiller culturel, scientifique et de coopération de l’Ambassade de France à Kingston, Jamaïque, et auprès du Commonwealth des Bahamas. J’avais entretemps fondé, avec Jean Fouchard pour président, le Comité Haïtien du Bicentenaire de la Révolution française dont  j’assurais le secrétariat-général et qui fut à l’origine de nombreuses manifestations remarquables parmi lesquelles un grand colloque historique international de plus de deux cents intervenants tenu à l’Institut Français. Ces activités me valurent le plaisir et l’honneur de connaître et de fréquenter, trop brièvement hélas, l’un des hommes les plus remarquables qu’il m’ait été donné de rencontrer, Michel Baroin, accompagné de son jeune fils, François, aujourd’hui ministre, qui vint me rencontrer en Haïti pour évoquer durant tout une journée les célébrations à venir, à peine nommé de manière très œcuménique par une lettre signée à la fois du président François Mitterrand, du premier ministre Jacques Chirac et du président du Sénat René Maunoury, à la tête de la Mission interministérielle du Bicentenaire, en succession d’Edgar Faure dont le Secrétaire général du Haut Conseil de la Francophonie, Stélio Farandjis, m’apprit qu’il avait formé le même projet dans la semaine qui précéda son décès. Je reviendrai plus tard sur cette rencontre avec Michel Baroin, tragiquement disparu peu après dans un mystérieux accident d’avion en Afrique après m’avoir confié pour publication quelques pages à faire paraître dans Conjonction, la Revue franco-haïtienne de l’Institut Français d’Haïti dont j’étais alors rédacteur en chef. Pages qui furent censurées à peine imprimées par notre ambassadeur en poste, Michel de La Fournière, sans doute pour des raisons d’ordre politique, mais aussi personnelles (il était lui-même historien de formation), puisque je représentais alors en Haïti l’ancien Premier ministre Raymond Barre, candidat à la présidence.

A mon départ d’Haïti, la présidente Ertha Pascal Trouillot me remit à mon tour, pour services rendus à la première république noire du monde, les insignes de Commandeur de l’Ordre National Honneur et Mérite de la République d’Haïti, que je porte toujours avec fierté et émotion, étant aujourd’hui le seul Français vivant parmi les quatre à en avoir été honorés, et qui plus est, ne les ayant pas reçus par les dictateurs Duvalier ou Aristide. L’ambassade de France, auprès de laquelle j’étais alors attaché linguistique, m’inscrivit aussitôt, pour ne pas être en reste, sur la liste de la prochaine promotion des Palmes Académiques, reconnaissance tardive qui ne me parvint officiellement qu’après mon retour en France. La remise d’insignes, qui de ce fait ne put avoir lieu au milieu de mes amis haïtiens et français d’Haïti, fut toutefois célébrée à La Rochelle et les insignes remis par Colette Chaigneau au nom de Michel Crépeau aux côtés de qui j’avais œuvré dès 1980 à la fondation du Musée du Nouveau-Monde dans les locaux de l’hôtel Fleuriau et au démarrage et à la mise en place, en liaison avec son conseiller culturel de l’époque, l’actuel maire, mon ami Maxime Bono, de toute une série d’actions innovantes de coopération avec Haïti, parmi lesquelles le jumelage de l’hôpital français de Port-au-Prince et de celui de La Rochelle où l’on peut voir encore mon nom sur la plaque commémorative de cette action.

J’appris peu de temps après les décès successifs et très rapides de mes confrères et amis Jean Fouchard, Alain Turnier et Laurore Saint-Juste, bientôt suivis par celui de Gérard Laurent qui avait succédé à Alain Turnier à la présidence, puis de son successeur Roger Gaillard que j’avais recommandé peu de temps auparavant auprès de Stelio Farnadjis et de son adjoint, fils de l’ex ambassadeur de France en Haïti François-Claude Michel, pour le siège d’Haïti resté vacant au Haut Conseil de la Francophonie.

Mon grand ami Georges Corvington a survécu par miracle dans sa belle maison de famille de la rue Chériez à l’épouvantable séisme qui a ravagé Port-au-Prince le 12 janvier dernier et endeuillé tant de familles. Il continue à se dévouer pour la Société, comme il l’a toujours fait si admirablement et discrètement, contre vents et marées, et l’Institut de Sauvegarde du Patrimoine National (encore une  aventure de jeunesse sur laquelle je reviendrai…) a fort heureusement  entrepris la sauvegarde de sa bibliothèque et de ses archives.

NB. Depuis cet article paru il y a dix ans, Georges Corvington a malheureusement disparu lui aussi, tout comme le Président Manigat. 

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Une saga gasconne : des vicomtes de Marsan aux barons de Cauna (part. 2)

15 Décembre 2020, 17:09pm

Publié par jdecauna

Château de Cauna.
Château de Cauna.

Château de Cauna.

Une saga gasconne : des vicomtes de Marsan aux barons de Cauna (part. 2)
L’impôt du sang français

Bernard et ses successeurs payèrent dès lors l’impôt du sang dans les guerres françaises d’Espagne et d’Italie. Après la désastreuse guerre civile navarraise entre Beaumontais et Agramontais, son fils aîné, Guilhem-Ramon, « Très haut, très puissant et magnifique seigneur de Cauna et de Poyaler », servit Louis XI en Catalogne en 1473 et dans la guerre de succession de Castille en 1476. Viendront ensuite, avec le « temps des capitaines », les tentatives de reconquête de la Navarre par les Albret où s’illustrèrent les compagnies de Lautrec et d’Esparros dans lesquelles servent les frères Etienne, Martin, Pâtris et Jean de Cauna. Mais la saignée la plus importante qui viendra décimer la postérité, à raison d’un homme sur deux, sera celle des douze guerres d’Italie : Pâtris, seigneur de Fousseries, et le bâtard de Cauna sont tués à Pavie en 1525 avec M. de la Palisse ; le cadet Martin de Cauna, baron de Mugron, vétéran de Pampelune, Fontarabie et Bayonne en 1523, est tué au siège de Naples sous Lautrec en 1528 ; Menauton de Cauna, autre cadet qui a épousé l’héritière de Lahire, disparaît avant 1536, comme Bernardon de Cauna, seigneur d’Abère en Béarn… D’autres cadets plus obscurs comme Loys et plusieurs Arnaud de Cauna, apparaissent encore dans les montres et revues des compagnies de Lautrec et de Navarre entre 1520 et 1560 sans qu’on connaisse bien leur sort. Cette tradition guerrière ne disparaîtra qu’au début du 17e siècle, avec un dernier Arnaud de Cauna, hommes d’armes à Melun en 1603. Plus chanceux que prudents, l’aîné, Etienne, alias Esteben, baron de Cauna,  Mugron, Poyaler... et autres terres, nommé sénéchal des Landes par François Ier après quelques aventures guerrières, notamment à Fontarabie, et le benjamin, Johan, baron de Tilh et Misson, vétéran d’Italie comme son fils, autre Jean, ont eu le temps de se retirer sur leurs terres après de beaux mariages (trois pour Etienne, deux pour Johan), seuls survivants des sept frères avec les deux ecclésiastiques, Peyroton, curé de Cauna, et Bertrand, abbé de Saint-Loubouer, protonotaire apostolique et titulaire de deux canonicats dans le Milanais dont la déroute de la Bicoque et l’abandon de Milan face aux Impériaux et au Pape provoquèrent la perte. Ce fut aussi le début de la prédominance de l’artillerie lourde et des armes à feux sur les champs de bataille qui prépara la fin de ces dynasties chevalières.

Les événements purement français des guerres de religion, de la Fronde et de la Révolution apporteront encore leur lot de disparitions brutales dans ce qu’il est convenu d’appeler les Temps modernes. Du premier mariage du baron Etienne avec sa cousine Eléonore, héritière de la maison de Poyloault, le fils aîné Jacques de Cauna, baron de Poyloault, mourut de son vivant, suivi de près par son fils Claude, cavier de Thétieu, laissant ainsi la place à la sœur cadette, Françoise, qui transmit l’héritage de la branche aînée par mariage à son très proche cousin François de Caupenne (avec dispense postérieure du Pape pour une tardive régularisation de ce mariage « arrangé » de tout jeunes enfants). Par leur fille Marguerite de Caupenne les biens de la branche aînée passèrent dans les maisons de Monluc, de Lauzières marquis de Thémines, et de Lévis, duc de Ventadour, pour aboutir à la fameuse duchesse de Ventadour, gouvernante des enfants de France que Louis XV appelait « Maman ». Après un second mariage d’intérêts et sans postérité d’Etienne avec une autre parente proche, Françoise de Lur d’Uza, veuve de Caupenne, une troisième noce avec Jeanne d’Abzac de La Douze vint compliquer considérablement la succession avec la naissance de quatre filles dont deux (l’aînée et la dernière) furent mises au couvent et une troisième mariée rapidement, pour favoriser l’union avantageuse de la cadette dans la maison d’Andoins, premiers barons de Béarn, qui aboutit à la naissance de la comtesse de Guiche, la célèbre Corisande, égérie d’Henri IV, que sa propre mère, la comtesse d’Andoins, Marguerite de Cauna, avait été tenu sur les fonts baptismaux, faisant pour Madame Claude de France, fille du Roi retenue à Paris.

L’alliance de la branche aînée avec le fils du célèbre capitaine catholique Monluc fut cause de grandes destructions dans les biens de la maison de Cauna, Caupenne et Poyloault. Ainsi, lors de la contre-offensive de Montgomery contre Terride en Chalosse, on peut suivre à la trace les exactions sanglantes et pillages de ses troupes et de ses lieutenants Montamat, Paulin, d’Estoupignan, Bougues, dans les fiefs familiaux de Montaut, Nerbis, Mugron, Magescq, Cauna et Lagastet où les églises sont pillées et brûlées. En Béarn, les branches cadettes d’Abère et de Nargassie voient leurs biens spoliés sur ordre de la terrible reine Jeanne. Johanot de Cauna, enseigne de Gohas, périt au siège de Navarrenx où dans le camp adverse des Réformés, son proche cousin Bertrand de Gabaston de Bassillon, gouverneur de la ville quoique catholique, a été assassiné en pleine rue par les sbires de Montgomery sous prétexte d’intelligence avec l’ennemi. Corisande, toujours catholique, reste alors le seul rempart familial permettant l’obtention par sa royale faveur de lettres de grâce ou de rémission aux membres de la famille, veuves des combattants, ruinées par les guerres.

Lorsque Henry de Cauna, filleul d’Henry IV, seigneur d’Abère, Aurice, Escoubès, Horgues et Espoey, époux de Françoise de Caupenne d’Amou, vend son dernier bien en 1607, avant de mourir sans postérité, les seuls porteurs du nom encore possessionnés sont les descendants de Jean de Cauna, seigneur de Camiade, porteurs des mêmes prénoms lignagers de Jean pour les aînés et héritiers et d’Arnaud pour les cadets, qui subsistent tant bien que mal sur leurs terres qu’ils travaillent, activité non dérogeante, dans les campagnes environnant la ville de Tartas qui est devenue un fiel calviniste. Ils n’ont apparemment plus de rapports avec leurs parents héritiers des branches aînées et cadettes aux noms prestigieux de Lévis-Ventadour, Thémines-Lauzières, La Guiche de Saint-Géran, Montaut-Bénac-Navailles, Gramont, Lauzun, Gontaut-Biron... et autres vivant dans l’intimité royale et des Grands à la Cour et ne s’intéressant plus que très rarement à leurs biens de cette campagne chalossaise perdue.

Suzanne de Lauzières-Thémines-Monluc, marquise de Thémines – petite-fille du maréchal Pons de Lauzières qui avait arrêté avec ses deux fils, dans l’appartement de la Reine-mère, le père du Grand Condé, premier Prince du sang – dame de Cauna Mauco, Toulouzettte, Miremont, Caupenne, Lahosse, Poyloault, Lahontant, Magescq, Gourbera, Poy-sur-Acqs, Téthieu, Buglose et autres terres, fait exception lorsqu’elle s’avise de fonder dans ce dernier bien par un acte de donation du 26 octobre 1629 la fameuse chapelle des miracles et le pèlerinage de Buglose sur vingt journaux de terre, à la seule réserve de ne pas y mettre de marques de propriété seigneuriale autres que les siennes, ses armes, de chaque côté de Notre-Dame, et de dire les messes accoutumées pour elle, ses parents et son défunt mari, ainsi qu’une grande messe haute tous les sept janvier « à perpétuité pour les âmes des défuncts Seigneurs et Dames des maisons de Caupenne, maison de Poyloault et maison de Cauna » en présence de tous les prêtres et autorités ecclésiastiques, avec la veille un libera des trépassés auquel seront appelés tous les bayles, officiers, domestiques ou fermiers de la dite dame. Et tous les dix avril « semblable service pour les âmes des défuncts seigneurs et dames des maisons de Monluc, maison de Montsallier et maison de Thémines ». Promesses éternelles dont aucune ne subsiste aujourd’hui face à l’emprise de Saint-Vincent de Paul et de ses promoteurs Lazaristes devenus acquéreurs et nouveaux seigneurs des biens de la dite demoiselle le 30 juin 1715 à la dispersion des immenses domaines des Ventadour.

Marie de La Guiche de Saint-Géran (fille du maréchal comte de La Palice), après Suzanne de Thémines-Monluc et avant son fils Louis-Charles de Ventadour, beau-père de la fameuse duchesse, est l’une des dernières, à la fin du 17e siècle, à rendre hommage pour le château de Cauna et autres biens abandonnés par les héritiers du sang depuis Marguerite de Monluc, abbesse de Prouillan, fille aînée du maréchal auteur des Commentaires, la dernière à y résider entre 1563 et 1567, sa nièce Marguerite vivant retirée à Magescq en 1577, où elle entretenait une garnison contre les huguenots voisins.

 

Derniers feux de la mémoire disparue

La Fronde achèvera la ruine du château, occupé par le célèbre capitaine bohémien Balthazar de Gacheo pour les Princes, l’une de ses trois places fortes avec les villes murées, comme Cauna, de Tartas et Saint-Justin, à l’occasion d’un siège de trois jours en 1653 au cours duquel le canon, traîné par des bœufs depuis Dax, détruit la plupart des bâtiments et des ouvertures à l’exception de la grande porte massive cloutée et ferrée et du monumental donjon féodal qui sera rasé du tiers ensuite en représailles. Livré à l’incendie et au pillage après la fuite de la garnison irlandaise, le château dévasté et dont les titres ont disparu, est vendu et tombe en des mains étrangères. Le capitaine Darricau, lieutenant de Balthazar, s’est aussi attaqué au château de Poyaler délaissé par ses propriétaires, les Montaut-Bénac, héritiers des Gabaston de Cauna, et Balthazar en personne à la salle de Thétieu dont Claude de Cauna, fils de Jacques, mort jeune, est le seigneur cavier, dernier du nom, et qui est pillée et brûlée avec tous ses titres.

Un dernier épisode dramatique intervient sous la Terreur avec l’incarcération sur dénonciation au Comité de surveillance de Tartas du « cy-devant seigneur de Ladevie », le « citoyen Jean Cauna », alors âgé de 67 ans, qui fut accusé « bien loin d’avoir donné des preuves de son amour pour la Révolution, d’avoir au contraire tenu des propos contre elle puisque l’ancienne municipalité l’ayant regardé comme suspect l’avait fait désarmé [sic] comme tel ». Sur quoi, on saisit ses armes [c’est l’image du gentilhomme campagnard travaillant sa terre l’épée au côté], on posa les scellés sur ses papiers [autrement dit, on lui confisqua ses titres pour mieux le voler par la suite] et on le transféra « à Mont-de-Marsan pour être déposé dans la maison destinée à recevoir les aristocrates ». En espérant probablement qu’il y laisserait la vie. Il ne fut élargi, avec son ami et parent Jean-Baptiste Larreyre, autre député du Tiers, qu’après un mois et douze jours de réclusion, paraissant « avoir expié suffisamment la mauvaise humeur qu’ils avaient témoigné contre la Révolution » et « leurs propos inciviques ». On perdait la tête pour moins que cela en ces temps-là. Mais les Terroristes craignaient manifestement leur influence sur les masses rurales qu’ils représentaient. La tradition dit que le seigneur de Ladevie, du Hillon, de La Douze et autres terres et bois nobles en Meilhan, s’était fait livrer un repas festif bien arrosé et qu’à son issue, il se soulagea avec son ami Dupuyau de Bouneau (parent des Pic de Blays de La Mirandole landais) sur le bonnet phrygien du sans-culotte de service au pied de la tour en l’interpellant en gascon comme on peut l’imaginer. « Emu par ce geste patriotique, le gardien sans-culotte alla plaider sa cause au tribunal révolutionnaire ». Bien loin des manières de cour sophistiquées, nous rejoignons là ce « haut du peuple » qu’évoquait Pierre de Vaissière dans ses Gentilshommes campagnards de l’ancienne France.

Les persécutions ne s’arrêtèrent toutefois pas là puisque quelques mois plus tard on imagina de taxer les « ex-reclus » « pour l’édification du Temple à l’Etre Suprême » au même titre que les «ex-nobles, les riches, les aristocrates, les fanatiques, les égoïstes, les indifférents en la Révolution et les intriguants [sic] ». Cochant la plupart des cases, il fut l’un des plus lourdement taxés de la ville avec les Chambre d’Urgons, Chauton, Vidart-Soys, Darribehaude, Fargues… Alors que quelques année plus tôt, il procédait par retrait lignager noble à la récupération de plusieurs biens familiaux, il dut, pour conserver quelques biens dont le plus précieux, la vie, vendre son moulin noble de Ladevie et oublier titre et particule, prudence toute terrienne dont témoigne son acte de décès en 1802. Ses successeurs, tous meuniers propriétaires vivant sur leurs biens, se signalèrent surtout par leurs démêlés avec leurs voisins nouveaux-venus jusqu’à ce que l’un d’entre eux – assez riche pour être le premier possesseur d’une voiture à Tartas et envoyer sa fille étudier dans un couvent espagnol – revienne s’installer dans la maison noble du moulin, après avoir annoncé à la cantonade à la surprise générale en patois (gascon) qu’il reviendrait occuper les lieux et qu’il donnait pour cela « ajournement à huit jours » aux occupants (il devait en avoir racheté ou retrouvé les titres). D’où le nom actuel d’Aux Oeyt Jorns (tel qu’il figure textuellement dans le Coutumier de Saint-Sever) donné à la maison. Un autre, moins fortuné mais tout aussi tenace, fit apposer à l’orée du siècle dernier, en 1914, un écu gravé au nom de Cauna sur la porte de la petite maison maison neuve du très ancien domaine avec parc de Caouna dans la paroisse disparue de Saint-Genès.

On ne peut manquer d’évoquer pour boucler la boucle, à côté des officiers publics et de ceux qui sont morts pour la France dans la première guerre mondiale ou ont survécu à l’hécatombe (comme le très discret grand-oncle Pierre, mitrailleur puis instructeur de tirailleurs sénégalais, Croix de Guerre, Médaille militaire), le très populaire abbé Joseph Bordes (puis chanoine), petit-fils de Jeanne de Cauna de Ladevie, fondateur des Jeunesses Agricoles Chrétiennes, héros de Douaumont en 1916, deux fois blessé, Croix de Guerre, Médaille Militaire et Légion d’Honneur, puis résistant de la première heure à la barbarie nazie, arrêté par la Gestapo, déporté à Buchenwald et fusillé dans la forêt de Gaggenau en 1944, dont la figure n’est pas sans rappeler celle de son illustre aïeul, l’évêque de Dax Jean de Cauna, chevalier croisé mort en Palestine aux côtés de Richard-Coeur-de-Lion.

La suite est entre les mains d’Esteban, Noémie, Morgan, Gabriel, Rose et Arnaud de Cauna, dix-septième du nom, et leur postérité à venir.

 

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Une saga gasconne : des vicomtes de Marsan aux barons de Cauna (part.1)

14 Décembre 2020, 14:43pm

Publié par jdecauna

Blason de Marsan de Cauna losangé d'or et de gueules et Armes d 'Arnaud de Cauna sous le porche de l'église de Cauna ancienne chapelle seigneuriale ca 1345
Blason de Marsan de Cauna losangé d'or et de gueules et Armes d 'Arnaud de Cauna sous le porche de l'église de Cauna ancienne chapelle seigneuriale ca 1345

Blason de Marsan de Cauna losangé d'or et de gueules et Armes d 'Arnaud de Cauna sous le porche de l'église de Cauna ancienne chapelle seigneuriale ca 1345

Article paru dans Baskulture. La lettre du Pays Basque, du Vendredi 11 décembre 2020. Hommage à Alexandre de La Cerda.

Petit village, grande histoire

 

Par leurs nombreuses alliances dans les principaux lignages du pays et leur prestigieuse origine dans les vicomtes de Marsan - eux-mêmes issus des ducs de Gascogne - les cadets de la maison de Marsan connus sous le nom de leur terre et forteresse de Cauna en Chalosse, sont représentatifs de ces familles de la plus ancienne noblesse chevaleresque étroitement mêlées à notre histoire régionale et nationale, à travers l’inébranlable fidélité aux rois-ducs de l’Aquitaine anglaise ou l’hécatombe des interminables guerres d’Italie, les ravages des guerres de religion et de la Fronde ou encore les exactions de la Terreur révolutionnaire...

Autour de sites et de noms de légende, Poyaler, Buglose, Poyloault, le Vic-Bilh, la forêt de Mauco, l’Adour, les Navailles, Lescun, Gabaston..., à la suite du premier d’entre eux, le chevalier troubadour Arnaut-Guilhem de Marsan, contemporain d’Aliénor d’Aquitaine, jusqu’aux derniers représentants du nom toujours obstinément accrochés à leur terre d’origine, l’évêque chevalier croisé Jean de Cauna, qui mourut en Palestine dans la suite de Richard Coeur-de-Lion, y côtoie l’abbé Bordes, héros de la résistance landaise, aussi bien que le célèbre La Hire, compagnon de Jeanne d’Arc, ou le gouverneur pour le roi d’Angleterre Louis de Cauna, qui reçoit Charles VII lors de la jornada de Tartas, le capitaine aventurier Peyrot de Monluc, mort au combat à Madère, la fille de la comtesse Marguerite de Cauna, Diane d’Andoins, la belle Corisande, égérie d’Henri IV, qui fut « presque reine », et ses illustres descendants, le galant duc de Lauzun, son arrière-petit-fils, qui épousa la Grande Mademoiselle, petite-fille d’Henri IV, les comtes de Gramont, bien connus dans la région, et jusqu’aux Grimaldi, princes souverains de Monaco…, lointains descendants actuels par l’alliance de Catherine-Charlotte de Gramont, arrière-petite-fille de Corisande, et de Louis de Grimaldi. Tout autant que le bien plus humble seigneur de Ladevie, Jean de Cauna qui s’honorait de ses fonctions bénévoles de syndic et marguillier de la confrérie de Saint-Martin, dite des laboureurs tarusates…

L’un de ses aïeux, Bernard de Cauna, capitaine du château de Pau pour le vicomte de Béarn Gaston IV son cousin, s’étant allié à la sœur de ce dernier, demoiselle de la maison souveraine de Foix-Béarn-Navarre, puis dans la maison royale d’Evreux de Navarre, il était, sans le savoir sans doute, cousin des rois de Navarre et de France, mais aussi de tout le Gotha couronné européen par sa nièce Anne de Cauna, ancêtre d’Eléonore Desmiers d’Olbreuse, mère de George de Brunswick devenu roi d’Angleterre et aïeule de la grand-mère de l’Europe, la reine Victoria, et par conséquent des rois d’Angleterre, d’Espagne, de Prusse, de Grèce, de Belgique, des Pays-Bas, de Suède, de Norvège, du Portugal, de Roumanie, de Bulgarie, de Danemark, du Grand-Duc de Luxembourg et du tsar de Russie… quand l’Europe couronnée était une seule et même famille1.

Un lointain descendant des premiers vicomtes de Marsan, un certain Henri, appelé aux plus hautes destinées eut un jour ce mot inoubliable : « Paris vaut bien une messe ». Ce millénaire d’histoire familiale gasconne mérite, lui, le détour, comme l’annonce la jaquette de présentation de l’ouvrage qui le relate dans tous ses détails qualifié d’« ouvrage de référence sur cette maison mais aussi sur l'Histoire des Landes et des familles landaises, notamment au Moyen Age »2.

 

Losangé d'or et de gueules : la maison gasconne de Marsan de Cauna

D'après les manuscrits d'Auch et de la Bibliothèque nationale, la paroisse de Cauna, en Chalosse, sénéchaussée de St-Sever (40), en latin Calnarium, a donné son nom à la famille qui portait le nom de Marsan, le tenant de ses auteurs les vicomtes de Marsan, descendants des ducs de Gascogne et souverains de la contrée où se trouvent les villes de Mont-de-Marsan, Roquefort-de-Marsan, St-Justin, Villeneuve-de-Marsan, Grenade et Cazères, et plus tard comtes de Bigorre et vicomtes de Louvigny (voir Marca, Oïhenard, et la Dissertation sur la maison de Foix, 1757, et Lachesnaye des Bois). Le premier porteur du nom de Cauna à apparaître dans un écrit médiéval est Achelinus-Attilius de Calnario, signataire avec bon nombre de ses parents de la charte de refondation de l’abbaye de Saint-Sever en 988 par son cousin le duc de Gascogne Guillaume-Sanche, le vainqueur des Vikings à Taller.

La baronnie de Cauna comprenait haute, moyenne et basse justice, et ses seigneurs étendirent successivement leur suzeraineté dans les Landes sur Cauna, Aurice, Mauco, Mugron, Lorquen, Poyaler, Saint-Aubin, Toulouzette, Miramont, Poy, Patin, Montaut, Poyloault, Magescq, Herm, Gourbera, Lahontan, Tilh, Misson, Caupenne..., etc. (extrait de l'Armorial des Landes, Cauna, 1865), et en Béarn, sur Abère, Escoubès, Meillon, Angos, Boeil, Assat, Astis, Aressy, Nargassie, Espoey, Horgues, Dorro, Bougarber, Cassaber…, etc (voir l’Armorial de Béarn, de Dufau de Maluquer, 1893).

L’histoire de la Maison de Cauna, l’une des plus anciennes et puissantes de Gascogne, d’extraction noble immémoriale, remonte au haut Moyen Âge. Déjà, en 1147, avant même la généralisation des armoiries, on croit pouvoir reconnaître leur blason losangé d’or et de gueules sur la monture d’un chevalier – qui pourrait être le troubadour Arnaut-Guilhem – dans une fresque de l’ancienne forteresse de Calatrava représentant le grand combat des chevaliers de cet Ordre contre les Sarrazins dans la province espagnole de Castilla-La Mancha, à la frontière avec l’Islam. Les mêmes armoiries sont encore visibles aujourd’hui, gravées dans la pierre, sur la porte de la modeste église du bourg de Cauna, ancienne chapelle seigneuriale du château, dont le donjon, réduit du tiers de sa hauteur après la Fronde, est le dernier vestige de la forteresse protégeant le gué sur l’Adour menant à Saint-Sever Cap-de-Gascogne, ancienne capitale provinciale romaine où la cour de Gascogne siégeait au palais des gouverneurs, le Palestrion. Ces armes, qui étaient également gravées dans la pierre au fronton de l’église du couvent des Jacobins avec la mention Cauna Fundator, sont aujourd’hui cachées sous l’enduit. Mais on les trouve encore en de nombreux endroits, sur la voûte de l’église de Roquefort et la muraille d’une tour de l’ancien château, sur celle de la crypte de Sainte-Quitterie du Mas d’Aire-sur-l’Adour, dans la fresque murale des blasons des évêques à la cathédrale de Dax, sur une autre (fresque votive de Poyloault) de l’église de Saint-Martin-de-Hinx, dans les blasons des villes de Tardets, de Magescq, de de Labastide-Clairence, et jusqu’à Lestiac-sur-Garonne...3

Quelques personnalités familiales, devenues personnages historiques, ont laissé plus que d’autres leur empreinte dans le récit des événements auxquels leur nom s’est attaché. L’un des premiers parmi les plus remarquables, Arnaut-Guilhem Ier, seigneur de Marsan, de Roquefort, de Montgaillard, de Cauna, de Saint-Loubouer..., et autres terres, était cousin du fondateur de Mont-de-Marsan, Pierre de Marsan, fils de Lobaner, devenu comte de Bigorre par son mariage avec Béatrix. Il était surtout un troubadour de renom, auteur de l’Ensenhamen, guide des jeunes chevaliers, très apprécié de notre duchesse Aliénor d’Aquitaine qui avait tenu à ce qu’il l’accompagne à la cour d’Espagne en 1170 pour le mariage de sa fille, une autre Aliénor ou Léonor, avec Alfonse de Castille, fils d’Alfonse VII, le vainqueur des Musulmans à Calatrava. Il était aussi très proche de Richard, futur Cœur-de-Lion, fils de la duchesse Aliénor, qu’il accompagna au siège de Dax contre son propre cousin par alliance Centulle de Bigorre allié à Pierre II de Dax, son gendre. Il était aussi cousin des Moncade, vicomtes de Béarn et de Gabarret, et des comtes de Comminges. Signataire de chartes de donation à Bayonne, aux abbaye de la Sauve et de Saint-Sever, il apparaît finalement comme l’aïeul fondateur des trois branches de la maison de Marsan : celle, aînée, des co-seigneurs de Marsan, seigneurs de Roquefort et de Montgaillard, éteinte en la maison de Pons, celle des seigneurs de Cauna, en Chalosse, subsistante en cadets du nom, et celle des seigneurs de Tardets et d’Ahaxe, en Soule, fondue dans la grande maison basque de Luxe puis de Montmorency-Bouteville et de Trois-Villes (le Tréville des mousquetaires)... ce qui donne des postérités à la fois charentaises, landaises, béarnaises et basques…

 

La fidélité aux rois-ducs anglais d’Aquitaine

Des dix générations constituant une longue théorie d’hommes de guerre au service des Anglais, héritiers par les ducs d’Aquitaine et Aliénor de leurs lointains ancêtres ducs de Gascogne, l’histoire a retenu ensuite la participation de plusieurs seigneurs de cette maison de Cauna, porteurs pour la plupart du prénom lignager d’Arnaud, dans les multiples chevauchées de ce qu’on appelle à tort la Guerre de Cent Ans qui dura en fait trois siècles dans notre région, mais aussi au pays de Galles et dans la guerre contre les Ecossais. C’est ainsi qu’un vicomte de Cauna (Guillaume de Marsan) est signalé en 1214 à la bataille de Bouvines, suivi d’un Arnaud de Cauna et Miramont, présent dans les années 1240-1250 à la défaite de Taillebourg puis à Bayonne et en Angleterre dans l’ost du roi-duc, lui-même suivi de son fils, autre Arnaud, fondateur du couvent de Saint-Sever, qui combat en Galles et en Béarn entre 1273 et 1283. Le suivant, Arnaud III, participe avec son frère Raymond à la guerre de Guyenne où on les trouve au siège de Saint-Sever et à la déroute de la bastide de Bonnegarde en 1295 et 1297 avant qu’il n’entrent en guerre privée contre leur voisin Bertand de La Mothe et Auger de Poudenx en 1312. Il était à la défaite de Bannockburn en 1314 en Ecosse et mourut de ses blessures peu après.

Arnaud IV de Cauna, époux d’Esclarmonde de Caupenne, reçut lui aussi plusieurs lettres de remerciements et donations de terres du Roi-duc pour ses bons services dans les guerres d’Ecosse, d’Aquitaine, d’Armagnac, et à Crécy et mourut de la grande peste en 1348. Son fils, le baron Arnaud V, accompagna le Prince Noir dans ses chevauchées et fut du contingent gascon qui se saisit à Poitiers en 1356 de la personne du roi Jean Le Bon avant d’être fait sénéchal de Marsan, mais il fut aussi des Gascons battus à Launac en 1362 et mis à rançon par Fébus. Son fils Robert dut alors épouser une béarnaise de la maison d’Espalungue en Ossau après avoir attendu longtemps que Febus lui rende ses biens et le château. Le sire de Cauna prit place alors au 2e rang des grands barons de Béarn et Marsan et participa aux sièges de Barcelonne-du-Gers et de Cazères qu’il défendit, Sault-de-Navailles, Saint-Sever, ett aux combats de la Chalosse, du Tursan et du Gabardan avec ses parents proches de Marsan, de Caupenne, de Lescun, de Béarn-Saint-Maurice, de Doazit... Son aîné, Jean de Cauna, prieur conventuel de Nerbis dont il avait bâti l’église, releva de ses ruines en 1430 la grande abbaye bénédictine de Saint-Sever dont il fut le 30e et dernier abbé régulier.

Le cadet et héritier, Louis de Cauna, « moult noble et puissant seigneur de la Chalosse » s’allia à une demoiselle de la puissante maison des Castelnau-Tursan, descendante des vicomtes de Tursan, et se mit à la tête des seigneurs locaux pour défendre la Chalosse jusqu’au bout contre les ravages des routiers au service du sire Albret pour les Français avant de remettre en 1442, au terme d’un gentlemen’s agreement honorable, les clés de la ville de Tartas, dont il était gouverneur « anglais » pour le roi-duc, au roi Charles VII en personne qui vint ensuite dîner et coucher au château de Cauna avec son fils, le dauphin futur Louis XI et ses principaux lieutenants dont le fameux Lahire son parent. Après trois siècles de fidélité aux Plantagenêts, Louis de Cauna jura de devenir « dorénavant français lui et toute sa descendance ». Cette fameuse jornada de Tartas, marqua la fin de la guerre en Gascogne dont tous les seigneurs se réunirent à Saint-Loubouer pour y tenir leurs Etats. On y procéda au mariage de Bernard de Cauna, capitaine du château de Pau, avec Isabel de Béarn, sœur naturelle du vicomte Gaston de Foix-Béarn, pour assurer définitivement la paix dans la région. Devenu veuf, il se remaria dans une autre maison souveraine, avec Jeanne de Beaumont-Lérin-Navarre, du sang royal de France de la dynastie d’Evreux-Navarre.

 

1 Jacques de Cauna, L’aïeule landaise de l’Europe, Pierre Benoit, Kœnigsmark et Anne de Cauna, Bulletin du Centre Généalogique des Landes, n° 103-104, 3e et 4e trim. 2012, p. 1352-1363.

2 Extrait de la jaquette de présentation de l’ouvrage de Jacques de Cauna, Cadets de Gascogne. La Maison de Marsan de Cauna, Pau, Ed. Princi Negue, 200-2004, 4 vol.

3 Voir Jacques de Cauna, L’Ensenhamen ou Code du parfait chevalier du troubadour gascon Arnaut-Guilhem de Marsan, avec Gérard Gouiran (transcription du texte), Pau, Editions Pyrémonde, 2007, 106 p.

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