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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 15:23
Château de Caupenne. Fragment de pierre armoriée.
Château de Caupenne. Fragment de pierre armoriée.

Château de Caupenne. Fragment de pierre armoriée.

L'énigme du château de Caupenne. Une pierre armoriée découverte sur le  perron. 

 

On ne connaît pas de document probant indiquant clairement la date de construction de l’actuel château de Caupenne. c’est une importante lacune historique qui laisse la place à des interprétations fantaisistes dans de nombreux écrits, parfois même officiels.

Il ne faut pas oublier, pour commencer, qu’il y a eu deux châteaux de Caupenne dans l’histoire. Le château primitif, une forteresse féodale en pierre, se situait sur la droite de la route menant à l’actuel quartier et église de Saint-Laurent, au lieu-dit Castet Bieilh (l’actuel bourg de Caupenne n’en était au Moyen-Age que la succursale, phénomène d’inversion semblable à celui que l’on peut observer entre Saint-Aubin et le hameau de Poyaler où subsistent la tour et quelques pans de murs du château féodal et de son enceinte). Il n’en subsiste que des vestiges de murs et soubassements engloutis dans la végétation et la terre de la motte subsistante en contrebas de la route.

C’est cette forteresse féodale qui fut détruite à l’époque des guerres de Religion, sans doute lors du grand raid de Mongomery en 1569 sur les biens de Chalosse et Marsan des familles catholiques de Poyloault, Cauna, Caupenne, Monluc alliées entre elles par le mariage de Marguerite de Caupenne et du capitaine Peyrot de Monluc, fils du maréchal Blaise auteur des célèbres Commentaires. Les troubles de ces guerres ne cessèrent qu’en 1622. En 1577, Marguerite de Caupenne se plaint encore de ne pouvoir se déplacer depuis son château de Cauna, où elle résidait en permanence, pour l’ouverture du testament du maréchal à Condom. Elle décéda après 1588, dernière trace écrite, et son fils, Jean-Blaise de Monluc, prématurément, au siège d’Ardres en 1596. La veuve en secondes noces de ce dernier, Marguerite de Balaguier de Monsalèz, épousa le 4 septembre 1603 Bertrand de Saint-Paul de Ricault de Vignoles-Lahire, petit-fils de Marie de Cauna. La succession de la branche aînée de la maison de Caupenne, héritière des celles de Cauna et Poyloault, déjà bien embrouillée, passe ensuite par mariage aux Lauzières, marquis de Thémines-Cardaillac, et ensuite aux ducs d’Estrées, puis de Ventadour, qui vivent à la Cour, dont la célèbre duchesse de Ventadour, gouvernante des Enfants de France, avec parallèlement, des procès de revendication de puissantes branches cadettes locales issues des quatre autres filles du vieux baron Etienne de Cauna, les Montaut-Bénac-Navailles, les Andoins, les Gramont… On dit même que sa Majesté le Roi-Soleil y fut intéressée.

Quoiqu’il en soit, le 21 mai 1664, c’est la dame duchesse de Ventadour, Marie de La Guiche de Saint-Géran, veuve du duc de Ventadour, qui présente son Aveu et Dénombrement dans lequel figure le bien de Caupenne. Elle héritait de la première épouse de son mari, Charles de Lévy, duc de Ventadour, la dame Suzanne de Thémines Monluc dernière du sang de la ligne aînée des Cauna Poyloault Caupenne. De ce dénombrement, 29 articles détaillent les biens et droits de la baronnie de Caupenne, à la suite de celle de Cauna, Mauco, Mugron, Poyaler, Aurice, Lagastet, Souprosse, Toulouzette et autres…, et ses dépendances de Poyloault, Larbey, Bergouey, Lahosse et moulin de Clauson, Couhin, Caufourn, caverie de Hon et Carbonnière, Brassempouy, Saint-Laurent de Lié, Lahontan, moulin noble de la Gouaugue, métairie noble et chapelle de Saint-Jean du Bosc…, etc. collationnés pour la Cour des aides de Guyenne le 4 mai 1718 à la demande de Bernard de Cès, acquéreur depuis le 25 septembre 1706 de cette dernière parte des immenses biens des Ventadour qui comprenaient également quatre autres baronnies dont celles de Poy-sur-Aqs, Buglose, Gourbera, Herm, Thétieu, etc... et celle de Magescq.

Le dernier héritier, le duc d’Estrées, avait cédé ces droits le 11 septembre 1695 à Jean Bonnet, sieur de la Caubane, qui devint le baron Bonnet de Cauna avant que son fils Pierre ne les cèdent par vente en 1699 au concierge du palais royal des Tuileries, Michel de Clinchamps, prête-nom d’un consortium de grands personnages de la Cour et d’hommes d’affaires, parmi lequel aurait même figuré le Roi Soleil, Sa Majesté Louis XIV. Caupenne fut alors revendu le 25 Septembre 1706 à Bernard de Cès, écuyer, conseiller du Roi, seigneur d’Horsarrieu, fils d’un juge de Doazit, qui prit ainsi le titre de baron et le nom de Cès-Caupenne. La baronnie de Cauna avait été revendue de la même manière le 28 juin 1706 à Christophe de Cabannes, qui devint baron et se fit appeler de Cabannes de Cauna, et celle de Pouy le 30 juin 1705 aux Lazaristes, qui s’intitulèrent aussi barons et fondateurs de Buglose à la suite de Suzanne de Thémines-Monluc.

Ce n’est donc qu’à partir de cette date de 1706 que l’on peut envisager un réemploi de cette pierre aux armes des de Cès-Caupenne. Mais alors à quelle date faudrait-il situer la première destruction de ce château du bourg, sachant qu’après les guerre de Religion, trop anciennes pour les de Cès, les seuls autres troubles locaux de grande ampleur dans la région sont ceux de la Fronde des Princes de 1650 à 1654 marqués par la prise et destruction à cette dernière date du château de Cauna, à l’exception de la tour carrée féodale ? Trop tôt aussi pour les de Cès se situe chronologiquement l’épisode de la gabelle avec d’Audigeos qui, de toute manière, n’a pas amené de destructions systématiques de châteaux.

Il ne reste donc, pour tirer au clair la date de construction du château neuf du bourg de Caupenne que le recours aux éventuels dénombrements effectués après le dernier connu en date, celui de la dame de Saint-Géran, duchesse de Ventadour en 1664.

Pour finir, le seul élément nouveau certain pour l’instant est la présence, à côté de deux pierres du perron numérotées 23 et 24 (ce qui paraît indiquer un réemploi réfléchi d’éléments antérieurs détruits et correspondrait donc bien à la tradition évoquée d’une reconstruction), d’une troisième pierre armoriée sur laquelle on distingue un fragment de blason qui est un écartelé dont seul apparaît très clairement le quatrième parti (ou quartier), en bas à droite, sur lequel apparaissent deux meubles qui sont de toute évidence deux chiens courants l’un sur l’autre (ici, clairement, des « braques » plutôt que « lévriers», qui sont les deux termes convenant en héraldique, le lévrier état plus fin et élancé). Et au-dessus un fragment du parti supérieur, le 3e, en haut à droite, difficilement lisible. On ne peut rie présager des couleurs état donné que le graveur n’a pas utilisés les points et traits (verticaux, horizontaux, en diagonales) d’usage en la matière.

On aurait pu penser dans un premier temps aux lévriers bien connus de l’ancienne maison de Poudenx (puisque Léonard de Caupenne d’Amou avait épousé en 1703 Rose de Poudenx), mais la confrontation aux armes des de Cès d’Horsarrieu s’avère décisive et correspond parfaitement à ce que l’on peut présumer sans crainte d’erreur du 4e parti de l’écartelé qui en fait partie. Ces armes dûment répertoriées par les armoriaux sont celles de Bernard de Cès, conseiller du Roi, Vice-Sénéchal de Lannes, Baron de Caupenne, etc., alias de Cès-Caupenne, Guyenne, Poyloaüt, Lahosse, Larbey, Saint-Laurent, Ossages, Agest, Horsarrieu, etc..., en Chalosse, Lannes, Dax, Saint-Sever... Écartelé, aux 1 et 4, de gueules, à deux chiens d'argent, courant l'un sur l'autre, au 2, d'argent, à une fasce ondée de gueules, au 3, d'azur, au chevron d'or.

Du coup, s’éclaire ainsi le 2e parti quasi illisible car on peut discerner sans trop craindre de se tromper la fasce ondée correspondante. Une « face » héraldique étant en effet une partition central horizontale entre le haut et le bas de l’écu (le « chef » et la « pointe »), en forme de barre d’une épaisseur double ou triple. Et l’onde héraldique faisant référence à ce quii peut suggérer un éléme,t liquide e, forme de vague ou sinuosité, ce qui est bien le cas ici.

On peut donc aisément dessiner une reconstruction complète de ce blason en rajoutant simplement le denier quartier marquant 3, c’est-à-dire un chevron - V renversé, voyez Citroën ou le blason de Capbreton). Et en utilisant bien sur les couleurs correspondants aux noms héraldiques : aux 1 et 4, fond rouge (de gueules), chiens blancs (d’argent),comme le fond du 2, avec barre à une sinuosité rouge, et fond bleu (d’azur) à chevron jaune (d’or) au 3.

J’ai lu quelque part que ce blason figurait au dessus de la porte d’entrée, ce qui renforce l’idée d’une destruction et réutilisation de la pierre. Viollet-le-Duc nous dirait tout de suite de le refaire graver selon les règles dans la pierre… mais auparavant, il me semble plus sage de reconstituer complètement les transmission successorales et/ou achats.

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